FUKUSHIMA DAIICHI, DILEMNES,

La situation au 29 avril 2011 à 2h, heure de Paris

 

 Le 26 avril vient de nous rappeler la catastrophe de Tchernobyl, il y a un quart de siècle. Depuis le précédent bulletin sur Fukushima ces trois dernières semaines écoulées font suite à l'importante réplique du 7 avril. Quelqus jours après, le 11 avril, un séisme de magnitude 7 centré sur la région de Fukushima a tué quatre personnes et aussi causé la perte d'alimentation électrique du réacteur n° 1 durant 40mn. Ce séisme a été suivi d'une réplique niveau 6- le lendemain. L'autorité météorologique japonaise a prévenu qu'un séisme de magnitude 8 est encore prévisible. Ce n'est pas sans conséquences sur les tranches en détresse. Des barrières de sacs de sable vont être installées pour se prémunir d'un éventuel nouveau tsunami en attendant des brise-lames plus définitifs.

 
Ainsi, les infrastructures endommagées par le séisme du 11 mars continuent de subir de puissantes répliques et vont devoir encore supporter d'autres tremblements tout aussi puissants. L'inspection des structures, l'évaluation des dommages et la vérification de leur tenue est tout à fait primordiale.
 
TEPCO avance dans ses actions, mais est confronté à des dilemnes en cascade. Les conséquences des accidents des quatre tranches n'en finissent pas de nous inquiéter. Ce sont bien quatre accidents distincts car les problèmes et les solutions sont bien différentes tout en se combinant entr'eux. Le 11 avril, l'agence nipponne de sureté nucléaire a ré-estimé l'accident au niveau 7, pour l'ensemble de la centrale de Fukushima Daichi.
 
 
TEPCO a réalisé une cartographie de l'irradiation à l'extérieur (extrait ci-dessus) pour pouvoir organiser les travaux de déblaiement et d'assainissement. Les essais de résine pour couvrir les sols et éviter la dispersion de la contamination est désormais concluant et toute la surface de la centrale va être traitée.

 

  
Les installations électriques ont été sécurisées: 3 lignes d'alimentation distinctes de l'extérieur, en cas de défaillance des solutions de transfert, de l'une à l'autre , entre les unités 1-2 et 3-4, et sur chaque unité, un système de secours diesel indépendant en appui. De l'eau douce est injectée régulièrement dans les réacteurs et dans les piscines.
Ce qui gène énormément les intervenants, ce sont tous les débris qui sont éparpillés, les zones fortement irradiantes à l'extérieur, l'impossibilité humaine à pénétrer dans les bâtiments réacteurs.
La principale fuite vers l'océan d'eau radioactive fortement polluée a été stoppée. Le niveau de radiations a fortement baissé au début, pour rester à des niveaux encore importants et finalement commencer à décroître ces derniers jours. Soit une grande quantité d'eau contaminée dans le sol a continué de se déverser, ou il y a encore plusieurs petites fuites non décelées. TEPCO a placé en mer des sacs de zéolithe pour fixer la contamination. Toute l'eau faiblement contaminée sur le site (10 400 T) a été évacuée dans l'océan entre le 4 et le 10 avril pour pouvoir reprendre les eaux fortement contaminées. De plus des citernes parallélépipédiques ont commencé à être installées sur le site et la capacité devrait atteindre 27 000 T fin mai. Le 19 avril, TEPCO et AREVA ont signé un accord pour une installation de décontamination d'eau. Les eaux seront ensuite déssalées et déshuilées des hydrocarbures.

 Voyons maintenant les situations particulières

Le réacteur n°1 a reçu des injections massives d'azote pour le purger de l'hydrogène.
La température dans le réacteur va de 110°C à 140°C selon les emplacements et les moments. Le refroidissement est obtenu par une évaporation permanente et un rejet extérieur de vapeur. Les quantités de radio-éléments rejetées ont maintenant considérablement diminuées. La température dans l'enceinte de suppression est de 52°C . Les pressions dans le réacteur, l'enceinte de confinement et la chambre de suppression sont stables et laissent présumer qu'il n'y a pas de fuite importante.
L'eau a été transférée du condenseur dans la chambre de suppression. De l'eau contaminée des galeries a été transférée dans le condenseur.
Les combustibles ne sont pas entièrement immergés. Le nombre de combustibles endommagés est estimé à 55%, et un nombre indéterminé sont considérés avoir subi un début de fusion.

 

Un robot a réalisé une inspection dans le bâtiment du réacteur. Le taux de radiations a été relevé..

 

Comforté par un état structurel suffisant des installations, TEPCO a maintenant commencé un essai augmentant les injections d'eau pour submerger les combustibles dans le réacteur.
La température de la piscine n'est pas connue avec exactitude mais est maintenue en dessous de 60°C.

  Le réacteur n° 2 est maintenu dans les 120/130°C. Il n'y a de pression ni dans le réacteur, ni dans l'enceinte de confinement, ni dans la chambre de suppression.

L'estimation est de 35% de combustibles endommagés.
La température dans la piscine est de 46°C.

 


On sait que le bruit s'une explosion ou d'une rupture brutale a retenti dans l'enceinte le 15 mars. Il est certain qu'il y a une fuite d'eau fortement contaminée provenant du réacteur (tuyauterie rompue?). De là provient l'eau fortement contaminée dans les galeries. Le condenseur a été vidé de son eau pour recevoir celle des galeries. Les efforts pour vider les galeries ont été assez vains, car le niveau d'eau a remonté après avoir baissé. Comment TEPCO va-t-il pouvoir refroidir et noyer les combustibles si l'eau injectée ressort très polluée? Comment faire cesser cette fuite?
De l'eau fortement contaminée a été pompée des galeries; le condenseur a été rempli et de l'eau a été transférée au centre de stokage du site.
L'humidité dans le bâtiment est supérieure à 95% embuant les objectifs des caméras des robots. Le niveau de radiation n'excède pas 10mSv.

 Le réacteur n°3 semble refroidi juste à la température d'ébullition. Il n'y a pas de pression dans le réacteur mais il y en a dans l'enceinte de confinement et dans la chambre de suppression. Le pompage de l'eau des galeries est lié à celui du réacteur n°2.
Un petit bloc de béton très irradiant, 900mSv/h près du bâtiment a été évacué. Le robot pour examiner l'intérieur du bâtiment n'a pu se déplacer vraiment à cause des nombreux débris sur le sol. 57 mSv ont été mesurés.

Ainsi, à la fois pour le réacteur n°2 et pour le réacteur n° 3, il n'est pas possible d'aller intervenir pour identifier et fermer les voies d'eau tant que les galeries ne sont pas débarrassées de leurs eaux polluées; et d'autre part il semble impossible de vider les galeries tant que les arrivées d'eaux polluées ne sont pas obstruées.

 

 

La température de la piscine n'est pas connue exactement.

 

 

 
La piscine n°4 a été équipée d'une sonde (ci-contre) indiquant le niveau et la température. L'ajout d'eau se fait avec le bras télescopique (62m) d'une pompe à béton.
TEPCO a estimé que les dommages du bâtiment sont tels que la structure ne pourrait résister à un fort séisme de magnitude 8 si la piscine était normalement remplie. Les injections d'eau sont donc ajustées pour obtenir le refroidissement nécessaire sans trop remplir la piscine. TEPCO envisage de renforcer la structure avec des piliers de soutien dans la salle en dessous. Pour l'instant il n'est pas encore possible d'aller dans la salle sous la piscine, et on n'ose imaginer ce qu'il adviendrait si la piscine se fracturait.

 
Si actuellement les réacteurs et les piscines sont stabilisées, un évènement extérieur peut encore tout remettre en question. Il faut aussi que le site soit remis à propre pour permettre la mise en place des nouveaux moyens, que l'installation de traitement des eaux (décontamination, dessallement et déshuilage) soit opérationnelle, que des refroidisseurs soient en ligne avec les réacteurs, que l'eau des piscines circule et assure le refroidissement.

 

 Il y a en projet le bâchage des réacteurs 1, 3 et 4, etc. Il faut encore 3 mois pour que tout ceci se mette en place. Et il faut attendre au moins la fin de l'année pour que les réacteurs soient effectivement refroidis et maintenus de façon pérenne.

Les conséquences des dommages des quatre tranches n'en finissent pas d'inquiéter.